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Nous avons parcourru l'été dernier un long sillon, inoubliable, dans l'immensité déserte et aride de sa moitié ouest, au Xinjiang puis au Tibet. Nous ne revons, depuis que d'arpenter l'autre!
Plaine infinie, villes sans mesures, lieux et monuments artificiels, ornés de tetes de dragons et de bassins à fleurs de lotus, nature polluée, chinois aux yeux bridés, discrets, peu avenants. Que ceux qui souhaitent conserver cette opinion commode et convenue de la Chine stoppe ici la lecture!. Depuis la frontiere vietnamienne, nous avons traversé les montagnes sublimes du Yunnan et du Setchouan, contreforts du plateau tibétain, aux profondes vallées encaissées et fleuves tempétueux, où vivent retranchées des minorités ethniques,bai,naxi,mosou,lolo... aussi étrangeres aux chinois de l'est que nous le sommes nous même! Nous n'avons croisé là, à de trés rares exceptions près, que des gens souriants et bienveillants.
Passage de la frontiere à LaoCai
Une fois de plus le passage de la frontière chinoise est pour nous une aventure. Coté vietnamien, rien de particulier. Coté chinois, nos visas chèrement acquis à Hanoi sont scannés, et des cartes d'entree et de sortie du territoire automatiquement éditées, tout commence on ne peut mieux. Les garcons accrochés à nos pattes, pour éviter une dernière fois les redoutables dames vietnamiennes qui les assaillent, nous attendons sereinement cette dernière étape avant la rue chinoise que nous apercevons à quelques mètres. Les tampons tombent sans questions sur nos passeports, Hen Hao !! c'est OK!
Ultime epreuve : la vérification des bagages!
"Books?" nous demande l'officier , montrant là, comme nous le verifierons, la totalité de son répertoire en anglais. Quelques "Pomme d'Api", "Tralalire" ou cahiers de travail de maternelle en piteux états, des guides de language russes chinois et mongoles, une grande carte de Chine, et cette édition 2005 de Lonely Planet récemment troquée à Hanoi. Il me semble a la fois anodin et prudent de ne pas lui cacher la presence de ce dernier, un vrai pavé ! Dans la marre en l'occurence !
Il s'y trouve une petite carte en couleur de la Chine, pas du tout à son gout. Nous finissons par comprendre, Taiwan n'y figure pas en couleur, affront à la République Polulaire de Chine pour laquelle la souveraineté vis à vis de Taiwan est incontestable !
Raison suffisante selon lui pour ajouter notre guide à sa collection de 4 autres dans son placard, confisqués eux aussi.
Je tente l'humour en proposant d'échanger le notre contre une de ces éditions flambant neuves, sans succés...
Hmm il nous ennuie avec ce livre alors que nos 2 couteaux tranchants passés aux rayons X n'ont meme pas attirés son attention.
Une seule solution pour contrer cette stupidité : hausser le ton, s'enerver! Je sors les couteaux.. euh non! :=)
J'arrache la carte de Chine du livre, la froisse et la lui mets dans les mains, tandis que je remets le reste du bouquin dans mon sac! Il est stupefait, puis se met à rire devant tout le monde. Signe de malaise à l'évidence, mais que peut il ? Nous prenons nos clics et nos clacs sans nous retourner et atteignons la rue : nous sommes en Chine!
Au Yunnan et Sichuan
Première impression de silence et de tranquilité, qui nous avait déja marqué dans les quelques villes de l'ouest du pays que nous avions visité. Ici des gens toutefois plus souriants et attentionnés qu'au Xinjiang! Comme au Nord du Vietnam, vit ici une multitude d'ethnies aux habits traditionnels differents, ces personnes nous accostent et engagent une conversation amicale,mais somme toute limitée malgré nos efforts d'apprentissage du chinois. Nous aimons déja ce pays!
Jusqu'à Kunming, le bus nous conduit en douceur sur une autoroute neuve, prenant et laissant au passage de nombreuses personnes sur la bande d'arret d'urgence, comme si le chauffeur avait encore ses vieilles habitudes de s'arreter à la demande. Elegantes femmes , halees de soleil, certaines portant des talons, semblant se rendre à un casting, sortie proprement de nulle part au milieu de ses collines.
Des paysans aussi, se rendant à la ville, de ceux qui comme nul autre ont la pareille pour faconner la nature à leur dessein. Point ici de tireur au flanc, chacun tiraille la montagne en ses flancs les plus abruptes, et tache de s'en tirer en exploitant les quelques portions de terres arrables.
Où ils passent, les arbres trépassent. Ainsi les collines, plus ou moins pentues, sont litteralement transformées en champs de bananiers ou de pechers, tandis que des serres à perte de vue protègent de précieux poivrons rouges.
Dans les vallées, on repique le riz sur d'immenses surfaces innondées via des aqueducs ou des barrages.
Des carrieres minent aussi comme des carries de belles "montagnes de pierre", assez semblables à nos causses. Enfin des camions de charbon extraient ce précieux minerai et l'assemblent en d'immenses tas sur lesquels la Chine entière est assise.
Kunming, ville de taille modeste avec ses 6 millions d'habitants, se developpe à l'image on suppose de toutes les villes chinoises: series d'immeubles en construction, dont certains ne seront pas achevés,shopping malls, innombrables magasins de voitures, boutiques de mode. Notre bus trouve son terminus à la gare où nous passerons une partie de la nuit à attendre le train pour Dali. Nous pensons un instant qu'il s'agit de l'aéroport. Passant une armée de militaires et policiers en faction, une heure de queue pour acheter les tickets, deux checks de baggages (on a toujours nos couteaux), nous atteignons deux salles d'attente couvrant au bas mot un demi hectare! Malgré la foule, tout est calme et tranquille.
Comme à l'aéroport,chaque train a sa porte d'accés, ouverte 20 minutes avant le départ.
Le quai, où personne n'attend, et le plancher du train sont de plein pied, nous n'avions pas eu ce plaisir depuis Berlin. 5h de sommeil seulement nous attendent, le train arrive en gare de Dali à 4h, et au petit jour nous sommes dans l'ancienne ville, fort agréable, malgré quelques (et uniquement quelques) rues trés touristiques. Lijiang peut faire penser à Chamonix ou au Mont Saint Michel, peu d'échapatoires au sein de la cité ancienne, nous n'avons pas trop apprécié.
Pour sortir de cet enchainement de villes , si petites soient elles avec leurs quelques centaines de milliers d'habitants, nous avons du faire de l'autostop, puis finalement trouver un petit camion qui emmene chaque jour 4 ou 5 personnes là bas, dans ce village perdu de Daju, sur les berges du Yangste.
Le temps semble y etre arreté, la pluie meme ne vient plus,vaincue par le soleil et le vent qui fait voler la poussiere entre de jolies maisons de terre aux motifs rouges. Notre petit camion qui arrive doit piler devant des chiens endormis que rien ne stresse, le nez des personnes agées, naxis vétus de bleu, touchent presque terre, les rires des enfants fusent à notre passage et Martin et Simon se font vite de nombreux copains avec qui courrir dans les rues que seules quelques motos affolent. La seule auberge qui peut nous acceuillir ne voit pas grand monde, plutôt des pensionnaires qui travaillent à refaire les routes, ou parfois quelques marcheurs qui poussent le pas jusqu'au fond des gorges du tigre. Ces gorges, nous les rejoindrons à pied, par l'est, aidés en partie par un camion nous evitant de porter notre sac à roulette, bien utile en ville mais vrai fardeau dans les rues pavées du village et les chemins de terre pentus menant au fleuve. Le chauffeur du ferry, descendu specialement à la demande de l'aubergiste pour nous faire traverser, c'est dire si le lieu est fréquenté, nous fait traverser le puissant courant du Yangste sur son raffiot rouillé. Ouf! vite de l'autre coté! Puis il monte Simon et notre enclume à roulette avec sa moto jusqu'à la piste qui surplombe cette rive du fleuve, tandis que nous hatons le pas dans leurs traces, chargés du reste des baggages, pour éviter de le faire patienter longtemps en haut. Ces efforts ont raison de nos réserves d'eau, et nous refaisons le plein chez une dame qui nous propose l'abris dans sa ravissante maison. S'ensuivent alors deux heures de marche (et pauses) sous un soleil de plomb, brulant un paysage somptueux, quand se presente le premier véhicule : un minivan nous prouvant une fois de plus que l'autostop n'est qu'une question de patience :=).
Le jeune businessman chinois qui a affreté cette voiture est ravi de nous proposer les 4 sieges vides qui l'entourent, à notre grande joie également ! Nous remontons ainsi les "Tiger Leaping Gorge", où l'eau boueuse et furieuse du Yangtse transperse au fond d'abimes deux massifs dont on peut voir les sommets glacés culminer 4000m plus haut!
Nous rejoignons ensuite Shangri La, paisible cité, porte d'une région de montagnes, forets et lacs sauvages oubliés aux confins nord du Yunnan. Sa ville ancienne a presque entièrement brulé il y a 3 mois, et nous logeons dans l'une des rares demeures encore sur pied : impressionnant spectacle que ces pelleteuses qui nivellent le terrain et laissent presager que dans 6 mois pourrait bien fleurir ici un quartier pastiche de l'ancienne cité.
A partir de là, deux routes se séparent en direction du Nord. Au Nord Ouest elle rejoint le Tibet, cet accés est interdit aux étrangers. Nous prendrons l'autre qui longe cette frontiere et qui nous mene, selon le panneau à Litang, à 400kms et 2 jours de bus aussi eprouvants qu'époustouflants ! Une piste de poussiere traversant selon les étages des prairies où paissent tranquillement les yacks, des montagnes de pins, des montagnes de rien, passant des cols à 4500m, jouxtant des précipices qui valent bien quelques tours de chapelets à prieres bouddhistes, puis des vallées encaissées et perdues, aux champs de blés verts, éclairés par la lumiere pure de la fin d'aprés midi, entourant les maisons les plus belles que nos yeux aient pu voir, de bois et de terre, savamment orientées, toutes semblables à des petites forteresses aux couleurs vives et aux motifs traditionnels. Puis au matin encore des montagnes, des glaciers de rochers, des hauts plateaux humides, puis de nouvelles vallées aux maisons de pierre à présent! Enfin Litang, gros village entouré de ses prairies où vivent des nomades bergers faisant paitre leurs yacks, avec des sommets enneigés en fond de toile. A 4000m les enfants s'accoutument au manque d'oxygene avec la meme insouciance qu'au Tibet l'été dernier, ils courrent et courrent encore!
Dans un village, la main dans celle de sa maman, Martin sent brutalement une douleur à la fesse. Un chien s'est approché par derriere et l'a mordu. Blessure superficielle, les dents n'ont pâs traversé son short et sa culotte. Le doute s'installe bien sur, ce chien a beaucoup de chance d'etre atteint de la rage dans ces regions reculées, et sa reaction d'attaque sans provocation conforte cette possibilité.
Nous sommes à 3 jours de bus de la premiere grande ville! Echanges avec l'assistance en France, les medecins correspondants en Chine. Heureusement nous avons fait les vaccins preventifs en France, qui nous laissent 4 ou 5 jours avant d'injecter les deux doses de vaccin apres morsure.
Sereinement, car la morsure ne ressemble qu'à une egratignure et les chances de contamination sont minimes, nous rejoignons donc Chengdu. Dés l'arrivée nous allons à la clinique (ouverte pour nous specialement un samedi apres midi) et faisons une premiere piqure. une seconde 3 jours plus tard.
Entre temps visite d'un parc où sont choyés des pandas géants et pandas rouges ( Firefox). Chouette moment de détente!!
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Isabelle et Jean-Marc (samedi, 31 mai 2014 19:53)
Bravo pour les photos et le compte-rendu de chaque étape...
Nous avons eu des nouvelles du petit blessé par Françoise et Bernard.
Bonne continuation et bonne route en Chine.
Bises Toulousaines.